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Ici, les affleurements de Home Plate explorés par Spirit.

Au niveau de la flèche blanche, on voit la figure caractéristique que fait un gros bloc projeté par une éruption volcanique qui retombe sur des niveaux de cendres non consolidées. Un tel dynamisme, commun sur Terre, implique un milieu avec un magma très riche en eau, la vapeur d’eau étant le principal gaz moteur des explosions volcaniques. Image Spirit.

Une analogie terrestre (ile Lipari, Italie) des affleurements de Home plate.

On voit ici,  les figures provoquées par la chute de blocs volcaniques projetés par des éruptions volcaniques riches en vapeur d’eau.

 

 

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A gauche :

Image montrant la géométrie des couches de grès de Yellowknife Bay.

L’inclinaison des strates de 2ème ordre contenues dans des strates de 1er ordre, plus épaisses et horizontales, est appelée « stratifications entrecroisées ». Un tel dispositif est caractéristique de  sable déposé par des courants d’eau, coulant dans ce cas de droite à gauche. Image Curiosity.

 

A droite :

Image de grès déposé il y a 250 Ma dans la région de Brive (19) et montrant des stratifications entrecroisées, similaire à celles de Yellowknife Bay.

 

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Images d’un affleurement où l'on voit que certaines couches (F) sont comme festonnées.

Ces espèces de rides, nommées « ripple marks » sont ici symétriques, avec des pentes identiques de part et d’autre des crêtes sommitale. Un tel dispositif se crée sous de l’eau « clapotante ». Les ondulations de la surface, font se déplacer/regrouper les grains de sable présents en profondeur.

L’écartement entre deux rides (ici environ 5 cm) est du même ordre de grandeur que la profondeur de l’eau. Ce sable martien s’est donc déposé, il y a 3 à 4 Ga au fond d’une étendue d’eau profonde de seulement quelques centimètres. Image Opportunity.

En jaune à droite, photo d'un affleurement terrestre équivalent.

Image d’une « flaque d’eau » dégagée par la marée basse en Normandie.

Avant de se vider, cette « flaque » d’eau d’environ 10 cm de profondeur avait sa surface agitée par le vent. Le sable au fond de la flaque s’est organisé en ripple marks symétriques, que la « vidange » de la flaque d’eau a mis en évidence.

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Affleurement photographié par Opportunity montrant des strates horizontales perforées de « trous » de forme géométrique.

Ces « trous », sont des emplacements de cristaux solubles qui ont cristallisé dans la roche en formation, et qui ensuite ont été dissous. Ils sont nommés « pseudomorphose ». Leur forme suggère fortement que ces cristaux disparus étaient des cristaux de gypse. Sur Terre, le gypse se dépose classiquement au fond de lac salé en voie d’évaporation.

Exemple de roche sédimentaire terrestre âgée de 20 Ma et contenant des cristaux de gypse.

Cette roche a été dégagée par un éboulement récent. Le gypse étant soluble, il suffira d’attendre quelques années d’humidité et de pluie pour qu'il disparaisse et qu’il ne reste plus que des trous de forme géométrique, comme sur les images précédentes.

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Le paysage près du site d’atterrissage de Curiosity. Le substratum est constitué de couches horizontales que l'on peut suivre sur plusieurs centaines de mètres. 

Détail d’une des couches photographiées près du site d’atterrissage de Curiosity. On voit qu'elle est constituée d’une accumulation de galets maintenant soudés (un conglomérat).

Lit de galets déposés par la Durance. Les conglomérats du site d’atterrissage de Curiosity ont dû se déposer dans un contexte analogue.

Zoom rapproché d’un conglomérat martien de la figure précédente, et d’un équivalent terrestre. La similitude des roches suggère fortement une similitude d’origine.

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Image de strates régulières mais relativement épaisses. Elles sont caractéristiques d’un milieu relativement stable, mais avec d’importants apports venant du bord du lac. Image Curiosity.

Exemple de strates très fines, caractéristiques d’un milieu très calme, avec une très faible sédimentation, et sans doute assez loin du rivage. Image Curiosity.

Exemple de strates terrestres déposées au fond d’un lac il y a 220 millions d’années (Ma) au pied des Andes d’Argentine.

   C’est en 1972 qu’on a commencé à vraiment découvrir la surface de Mars avec la mission Mariner9. Immédiatement, les observateurs se sont aperçus que Mars, par certains côtés, ressemblait plus à la Terre qu’à la Lune, la seule référence de l’époque. En plus des calottes polaires connues depuis longtemps, des failles, des volcans géants et des lits de rivières asséchées étaient désormais identifiables. Toute cette « inactivité » semblait cependant relativement jeune (géologiquement parlant) et posait de nombreuses questions scientifiques, dont une allant plus loin que la seule soif de connaissance à cause de ses implications « philosophiques » : 

Au temps où les volcans crachaient et les rivières coulaient, Mars a-t-elle été habitable, voire habitée? Et si oui, ne le serait-elle pas encore dans quelques recoins à l’abris du rayonnement solaire?

   Cela fait donc presque 50 ans que l’on sait que de l’eau a coulé sur Mars. Mais cette eau était-elle pérenne ou très épisodique, neutre, acide ou basique ? Si la vie terrestre peut habiter dans des milieux aux conditions extrêmes, la chimie prébiotique nécessite par exemple des pH neutres ou légèrement basiques mais est impossible en milieu acide. La vie terrestre nécessite quant à elle, une certaine « constance ».

 

   Voici quelques conclusions que l’on peut tirer d’études de terrains. Elles proviennent des explorations du robot de la Nasa, Spirit (2004-2009), de la mission Opportunity (2004-2018) et de la mission Curiosity (fonctionnant depuis 2012).

Spirit

Mars, son eau, sa vie

   Spirit s’est posé au fond d’un cratère à fond plat, Home Plate. Les images prises depuis l’orbite laissaient penser que le fond de ce cratère était recouvert de sédiments déposés dans un lac et que l’étude de ces sédiments permettrait de reconstituer les conditions de l’époque. Fatale erreur, les analyses faites sur place ont montré que ce cratère était rempli d’anciennes laves volcaniques, qui avaient recouvert les éventuels sédiments lacustres. Mais aussi bien les analyses chimiques (faites automatiquement par le robot) que l’interprétation de la géométrie des affleurements d’après les photos faites au sol ont montré que les éruptions volcaniques avaient parfois eu lieu sous l’eau d’un lac ou dans des terrains gorgés d’eau.

   Ce sont ces comparaisons entre des cas terrestres et des cas martiens similaires, qui permettent aux géologues de proposer des interprétations de ce qu'ils voient sur Mars par robot interposé.

Opportunity et Curiosity

Cliquez pour les découvrir

   Opportunity et Curiosity se sont eux posés sur des terrains fait de roches sédimentaires bien stratifiées comme l’avait déterminé les sondes en orbite. En analysant les milliers de photos prises durant leurs trajets et les analyses faites sur place, les chercheurs ont pu identifier dans quels milieux et paysages s’étaient déposées ces roches il y a 3 à 4 milliards d’années (Ga). Dans ce passé lointain, la région de Mars où s’est posé Opportunity correspondait à une plaine parfois recouverte de dunes éoliennes faites de sable basaltique, parfois inondés sous une faible (quelques centimètres) tranche d’eau provisoire et alors parcourue de courants. Cette eau était salée et très acide.

1. Stratres régulières

2. Couches de grés

4. Substratum

5. Affleurement

3. Cristaux de gypse

Une preuve de vie encore bien lointaine

  Pour l’instant (22 mars 2020), les robots n’ont pas repéré de structures pouvant manifestement avoir été élaborées par une quelconque forme de vie, des fossiles visibles à l’œil nu en quelques sortes. Déjà sur Terre, les « fossiles » d’activité biologique très ancienne (> deux milliards d’années) sont très difficiles à repérer et à distinguer de structures non biologiques mais de morphologie assez similaire.

 

   Les plus vieilles traces de vie terrestre visibles à l’œil nu et qu’aurait pu voir (puis étudier) un robot s’il était passé à côté ont été trouvées en 2016 au Groenland, et datent de 3,7 Ga ; et leur origine biologique est encore discutée par certains chercheurs. Ces structures sont des stromatolithes, dépôts laminés de calcaire engendrés par des colonies de bactéries. Il est déjà difficile, sur Terre, d’être sûr de l’origine biologique de ces petites structures groenlandaises ; alors, si l'on trouvait des structures ressemblantes sur Mars…

 

 

GÉOLOGUE ET PROFESSEUR À L'ÉCOLE NORMALE SUPÉRIEURE DE LYON

 

 

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  Mais alors, comment des géologues, sur place par procuration via les robots, ont-ils pu arriver à de telles conclusions ? Voici quelques exemples de paysages et de roches qui ont permis ces découvertes.

   Curiosity s’est posé dans une région successivement occupée, dans ce même passé lointain, par deux épisodes lacustres, séparés par une longue période d’émersion. Les eaux de ces lacs étaient salées, mais non acides. Le site où a roulé Curiosity pendant ses trois premières années correspondait aux bords du deuxième lac. Puis, au bout de 3 ans, il a atteint des couches sous-jacentes, qui correspondaient au centre du premier lac. Ces deux lacs successifs s’asséchaient parfois temporairement et étaient remplacés par des plaines vaseuses ou des champs de dunes. Dans l’ancienne vase, Curiosity a trouvé des traces de matière carbonée, mais trop dégradée et en teneur trop faible pour savoir si elle avait ou non une origine biologique. De l’eau circulait en profondeur dans le sous-sol de ces anciens lacs et en altérait les roches.

Reconstitution faites par la NASA des périodes humides et sèches des anciens lacs dont les dépôts sont parcourus par Curiosity.

 

Étudier les roches pour connaître son passé

AUTEUR DE L'ARTICLE

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Tous nos articles ont été écrits en collaboration avec des chercheurs et scientifiques.

Prébiotique

 

Qui précède l'apparition de la vie sur terre

Lacustres

 

Qui vit, qui est situé sur les bords ou dans les eaux des lacs.

Affleurement

 

Intersection d'une formation géologique.

Roches sédimentaires

 

Roche formée par l'accumulation de plusieurs couches de sédiments.

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